Présentation
“Il faut imiter la modestie de la nature.”
Leon Battista Alberti L’art d’édifier (1485)
En recherchant la beauté, l’harmonie entre ordre et désordre, force et faiblesse, on se tourne vers la nature pour l’observer. Les images dessinées ou peintes que je réalise, se construisent à travers un protocole lent et minutieux. Chaque touche, chaque trait correspond à un pixel, un aplat de couleur plus étendu, chaque détail est représenté, laissant apparaître la trame d’une image numérique ou d’une projection. J’utilise des photogrammes de films pour l’aspect visuel qui leur est propre : le flou, la lumière, le cadrage – parfois improvisés, caméra à l’épaule, imposés par les contingences du terrain ou simplement résultats de l’arrêt sur image. L’image numérique du web et sa dégradation en pixel plus ou moins grossier ou encore la photographie argentique ancienne et ses couleurs jaunies, ses contours moins marqué sont à chaque fois des défis pris en compte lors de la représentation.
Ces caractéristiques de l’image interviennent dans le processus de création comme une manière de rendre lisible la source qui détermine le statut et donc le sens de l’image initiale. Le travail de représentation devient appropriation de ces images en vue de leur donner une dimension physique, matérielle, à l’échelle du corps. Les choix formels établis, le cadrage, le format, les couleurs utilisées, cherchent à magnifier l’image photographique de faible qualité trop proche du réel. La mise à distance réalisée par la représentation d’avec son modèle témoigne d’une volonté de subjectiver le sujet, de le ramener à l’échelle d’un individu, et de rendre possible une rencontre privilégiée entre une image et son spectateur.
Des habitations précaires soumises aux explosions de la terre par les séismes naturels ou provoquer par l’homme, des arbres dépérissants dues aux sécheresses répétitives rivalisent contre une nature apparemment verdoyante, 27 années après une catastrophe, telles peuvent être les sujets de mes recherches.
Notre époque est celle d’un désenchantement industriel qui s’accompagne d’un sentiment mêlé d’insouciance enfantine et d’angoisse face à une catastrophe qui menace d’arriver. Lorsqu’un chercheur en écologie me parle du chêne vert de méditerranée, j’y entends une description qui serait celle d’un homme et les images qui viennent à l’esprit sont belles et universelles, où l’homme et l’arbre se retrouvent face à une seule problématique, celle de la vanité du monde. Les images documentaires de territoires fragilisés sont les sources de mes peintures et dessins, elles se confrontent avec des photographies privées de l’enfance. Un univers anormalement naïf côtoie un paysage qui suscite la contemplation malgré son sujet grave. J’y montre des paysages, dévoilant une nature inquiétante, dégradée, déformée. Cette altération est suggérée par le traitement de l’image, l’effacement, la surexposition et le flou puis retranscrite en peinture. Les images d’enfance présentées parfois avec ces peintures renvoient à un univers sain et idyllique, à l’image de ces paysages qui semblent en apparence naturels, vierges de toute agression.
Briançon, 1990, Acrylique sur toile, 150 x 200. 2014.
La Roche-Bernard, 1987, acrylique sur toile, 150 x 200, 2014.
Plouha, 1990, Huile sur toile, 220 x 140, 2015.
Arrière-saison, 97 x 160, acrylique sur toile. 2015.
Chorillos, Acrylique sur toile, 162 x 97.. 2016.